J'ai repensé à ce livre, lu il y a dix ans, parce que Arte va rediffuser à partir d'aujourd'hui la trilogie du Parrain. Rappelons que Mario Puzo et Francis Ford Coppola s'étaient inspiré de ces évènements pour écrire la trame du parrain III. C'est sûrement un des livres les plus incroyables que j'ai pu lire, un récit qui tourne autour du scandale financier de la Banco Ambrosiano de Milan dont le directeur était Roberto Calvi et de l'I.O.R. (Institut des Œuvres Religieuses), en clair la banque de Vatican avec à sa tête, à l'époque, le sulfureux Monseigneur Marcinkus, protégé du pape, et c'est écrit par un témoin de première main, Rupert Cornwell, à ce moment-là correspondant à Rome pour le « Financial Times » qui a suivi tout le déroulé de l'affaire à partir de la découverte du corps sans vie de Calvi sous un pont de Londres. Ce qu'il y a de fascinant dans cette histoire, c'est aussi la frontière sans cesse mouvante entre la réalité et la fiction. Je m'explique : dans un des passages du livre, page 60, il est dit que Michele Sindona (peut-être un peu connu par ceux qui lisent sur le rock puisque Nick Tosches a écrit un livre sur lui
power on earth), le financier sicilien qui avait permis à Calvi et à sa banque de devenir l'intermédiaire avec la banque du Vatican, avait pour modèle la Gulf and Western et pas par hasard, puisque Sindona était ami avec Charlie Bludhorn, le patron de Gulf and Western (cité au début du générique du parrain III et dédié à sa mémoire). Or que possédait, entre autres, à l'époque Gulf and Western ? le studio Paramount qui produisait
le Parrain. D'ailleurs, à ce propos, je me souviens d'une interview de Coppola qui rappelait que Brando, au début des années 70, complètement démonétisé auprès des grands studios hollywoodiens, avait dû faire un casting pour décrocher le rôle de Don Corleone mais non pas pour le boss de la Paramount, Robert Evans, mais pour le patron d'Evans, Charlie Bludhorn, de même que selon Nick Tosches encore lui (lire « the man who kept the secrets », article publié dans Vanity Fair ), c'est le représentant de la mafia à Hollywood, Sidney Korschak, qui aurait libérer Pacino de son contrat à la MGM en lançant des menaces voilées à Kirk Kerkorian sur ses hôtels en construction à Las Vegas (je crois d'ailleurs qu'Elvis a chanté dans un des ses hôtels en 1969), ce même Korshak qui, selon certaines rumeurs persistantes, aurait été le modèle pour le personnage de Tom Hagen, joué par Robert Duvall. Calvi lui-même était un grand amateur du livre de Puzo. Pour en revenir au livre, il manque évidemment, les derniers rebondissements de l'affaire dont un témoignage de l'ancien mari de Brigitte Bardot, Günther Sachs, qui aurait déclarer que Pablo Escobar, le roi de la drogue de Colombie, aurait menacer Calvi parce qu'il n'arrivait pas à récupérer son argent mais toutes ces révélations nous emmèneraient trop loin puisqu'elles questionnent le rôle encore énigmatique qu'ont tenues la loge P2 et le Banco Ambrosiano en Amérique du sud dans les années 70.
Quatrième de couverture :
« Un matin de juin 1982, le corps du banquier Roberto Calvi fut retrouvé pendu sous un pont de Londres. Suicide ou assassinat ?
La mort mystérieuse de son patron précipita l'effondrement du groupe bancaire privé le plus important d'Italie.
« L'affaire » qui couvait depuis des années, ébranla les milieux financiers internationaux et se révéla être un des plus grands scandales de l'Italie d'après-guerre.
Un scandale dans lequel étaient impliqués tout à la fois le gouvernement et les partis politiques, la mafia et la police, les sociétés secrètes et la franc-maçonnerie - et le Vatican lui-même dans la mesure où Roberto Calvi était le banquier du Vatican.
L'extraordinaire histoire de Roberto Calvi met à nu la face obscure de la société italienne et tout un univers trouble d'intrigues où l'intimidation, le chantage, la fraude, les malversations et les détournements de fonds conduisent au crime.
Au terme d'une vaste et minutieuse enquête, Rupert Cornwell, correspondant à Rome du « Financial Times » démêle les fils de cette complexe affaire: une ahurissante chronique, digne d'un roman noir.»