Hello Franck,
Non assure-toi cette discussion n'est pas stérile, il faut simplement se rendre à l'évidence: nous n'entendons pas la musique de la même façon.
Je veux bien admettre un certains nombre de remarques que tu fais sur les défauts du vinyle, notamment cette coloration qu'il peut avoir parfois, j'y reviendrai tout à l'heure, mais il y a un point sur lequel je marque de façon ferme mon désaccord: la gradation de la dynamique fine.
Prenons un exemple: imaginons un violoniste qui joue sa corde de sol à vide (la chanterelle) et démarrant le plus pianissimo possible (
ppp), puis qu'on lui demande de pousser sur son archet pour arriver en bout de course à la plus forte intensité possible, c'est à dire fortissimo (
fff).
Mes oreilles me font clairement entendre que là où la restitution numérique proposera une trentaine de points de "gradation" (je dis "30" comme ça, c'est juste pour imager ma pensée et mon ressenti) entre le son le plus faible et le son le plus fort, l'analogique en proposera sans doute le double. C'est à dire qu'il y aura clairement à mes oreilles une différentiation plus marquée, bien plus nuancée du côté de l'analogique. Et plus l'alimentation moteur de la platine sera évoluée, plus cette différentiation sera importante.
Je pense d'ailleurs que c'est en partie cela qui explique la souplesse, la fluidité que l'on attribue au vinyle. Plus encore, comme le numérique ira "plus vite" du
ppp au
fff, on aura une fausse impression de dynamique, c'est ce que j'appelle "l'effet turbo" du numérique qui peut leurrer son monde surtout quand on n'a pas vécu longtemps auparavant avec une source analogique...
Contrairement à toi, je trouve, pour reprendre l'exemple du piano, que le numérique est plus artificiel que l'analogique notamment dans sa façon de rendre les attaques. En très peu de temps le système doit réagir: imaginons à nouveau les cinq millisecondes qui suivent l'attaque du marteau sur la corde: si durant celles-ci il n'y a que 10 paliers d'intensité (impression donnée par le numérique à mes oreilles) au lieu de 20 (pour l'analogique) eh bien on aura un sentiment flatteur d'une montée très rapide dans les tours, mais en réalité on n'entendra pas clairement l'attaque, on la devinera plus qu'on ne l'entendra. C'est sans doute pour cela que les prises de sons numériques tendent à être réalisées très près du tablier et des marteaux, pour en quelque sorte "compenser" ce phénomène.
Les disques de M.Petrucianni ou J. Terrasson sont un exemple assez parlant de ce phénomène, presque grisants, jubilatoires au premier abord, mais peu réalistes...
Il y a d'ailleurs me semble t-il une explication technique à cette lacune dans la différentiation des sons faibles du numérique, mais étant une bille en technique je ne m'étendrai pas là-dessus, je n'ai pas besoin de cet appui pour corroborer ce que mes oreilles me donnent à entendre.
Il me semble au passage que c'est la remarque qu'avait fait Jean-Marie Piel dans une de ses (excellentes) chroniques sons de Diapason à l'écoute d'un ensemble analogique Verdier+ Shindo justement (si ma mémoire est bonne). La supériorité du LP sur le CD dans la gradation de la dynamique fine l'avait frappé également...
Pour le reste, je partage ton avis, le vinyle peut être coloré. Cela est du sans doute à la qualité du support de la platine. Cela tient aussi à mon avis pour part à la correction RIAA qui, selon les étages phonos et les caractéristiques de la cellule est plus ou moins bien restituée. D'où l'intérêt d'avoir un pré ajustable comme avec le superline...
Quoiqu'il en soit, même si l'équilibre n'est pas parfait, un peu trop rond, ou au contraire qui tire un peu trop vers l'aigu, cette coloration préserve toujours une excellent transparence vis à vis de la musique et surtout une expressivité à laquelle le numérique à vraiment du mal à prétendre.
C'est sans doute un peu le sens du message de shadrap qui reconnait les limites de son support vinyle mais lui trouve tellement de charme.
Personnellement je suis passé au numérique il y a environ 10 ans (au début des années 2000). La première fois que j'ai branché un lecteur CD (pioneer PS 06) j'ai vraiment trouvé le rendu synthétique. Je m'y suis fait depuis, mais c'est ce qui m'a marqué à l'époque. Une bonne façon de se rendre à nouveau compte de ce phénomène pour nos cerveaux conditionnés à l'écoute numérique, est d'écouter attentivement les chuintantes dans la diction d'un chanteur qui sonnent souvent de façon artificielle (du moins à mes oreilles). Dans le même ordre d'idée le timbre d'une voix me parait avoir beaucoup plus de grain, de chair avec l'analogique. Le numérique a tendance a simplifier et à lisser légèrement les choses ajoutant un léger voile permanent (à mes oreilles) à la musique.
Pour finir, je n'ai aucune intention de jeter mon CD2 à la poubelle

C'est toi même qui sur ce forum encensait il n'y a pas si longtemps que cela la grande musicalité de ce lecteur. Je sais bien que tu ne jures que par le Modsquad (qui est sans aucun doute exceptionnel

) mais il faut rester mesuré ...
Quant au changement de ma source numérique vers une source plus HDG, ce n'est pas une option que je rejette, mais elle n'est pas d'actualité pour le moment. J'ai écouté à plusieurs reprise le CDS et surtout le CDS2 d'Almo, en comparaison directe avec la LP12... Mes conclusions sont exactement les mêmes qu'avec le CD2
Il n'y a fondamentalement pas de différence de nature entre ces trois lecteurs, il s'agit bien dans tous les cas d'un rendu numérique avec ses qualités... et ses défauts!...
A+
Dug